La question semble avoir échappé aux exégètes et opposants à la loi El Khomri, perdus dans leur nuit : des centaines de milliers de salariés sont abusivement privés de toute représentation du personnel ! On ne parle pas ici de PME dont l’effectif les place sous les seuils sociaux, mais de groupes d’envergure nationale : les réseaux de franchisés.
Cette question a en revanche retenu l’attention de quelques-uns de nos députés lesquels, s’inspirant de propositions de la CFDT des Services, ont déposé l’amendement n°1721 ( !) à la loi El Khomri pour faire cesser cette inégalité criante. Leur idée : créer des sortes de comités d’entreprises et des délégués syndicaux au sein des réseaux de franchise. Cet amendement est devenu l’article 64 de la loi travail qui institue une instance dite « de dialogue social commune à l’ensemble du réseau ».
La franchise, rappelons-le, c’est une bonne affaire : 70 000 points de vente, plus de 2 800 réseaux différents, un chiffre d’affaire évalué à plus de 53 milliards d’euros, la France peut se targuer d’être le « leader européen de la franchise ».
Une bonne affaire…sauf pour ses 350 000 salariés : conditions de travail dégradées, salaires inférieurs aux minimas conventionnels et même légaux, infractions diverses à la durée du travail, non-respect du repos dominical… De véritables « dirty jobs ».
Sur ces questions, les agents de l’inspection du travail en connaissent un rayon, c’est le cas de le dire. Combien d’entre nous rament depuis des années pour faire respecter les règles minimales du code du travail, notamment dans les supérettes ! Ils se heurtent en effet à deux difficultés majeures et interdépendantes : l’absence de toute représentation du personnel des salariés des franchisés et la difficulté d’atteindre les véritables instigateurs, à savoir les franchiseurs, véritables dirigeants de ces réseaux.
D’où l’équation bien connue :
Irresponsabilité des employeurs + absence de tout contre-pouvoir = fraude tranquille
Pour en sortir, il n’y avait pas d’autre issue que de modifier la législation et donner une existence légale, en droit du travail, à ces réseaux dont chacun sait qu’ils sont très intégrés sur le plan du fonctionnement économique et social.